mardi 27 janvier 2009

Egalité des chances? En théorie...

Tout commence à l'âge du jardin d'enfants et déjà là, la compétition est rude. Ceux qui en ont les moyens inscrivent leur enfant dès sa naissance (voire avant) dans une crèche bilingue où il ira dès ses 2 ans et où l'on développera ses facultés d'apprentissage. Pour l'école primaire, il y existe comme chez nous des écoles publiques (community school) et des écoles privées. Mais l'enseignement dans les écoles publiques n'est pas le même partout. Aucun enseignant ne souhaite travailler dans les écoles des quartiers "à problèmes" (comprenez les quartiers pauvres où vivent la plupart des Noirs et des Latinos): on y parachute donc d'office les enseignants débutants, qui feront des pieds et des mains pour être mutés dans une meilleure école le plus vite possible et s'investiront peu.
Il n'existe pas d'apprentissage comme on l'entend chez nous: on peut apprendre un métier (commerce, ingénierie, agronomie etc) au "college", les cours n'étant évidemment pas gratuits. Si l'on a eu de très bons résultats scolaires, il est possible d'obtenir une bourse mais avec la crise actuelle, les coupes budgétaires sont inévitables (et déjà annoncées par le Cape Coral Breeze dans son dernier numéro).
Les jeunes dont les parents n'ont que de modestes moyens et qui ont fait une scolarité moyenne doivent donc se débrouiller pour trouver un travail où ils seront formés sur le tas et mal payés (salaire minimal: 6 dollars l'heure). Il n'est dès lors pas surprenant que certains optent pour la délinquance, sachant que le trafic de drogue, par exemple, leur rapportera des sommes énormes très rapidement et qu'ils ne seront jamais au chômage... Dans ces quartiers, les gangs font la loi. En faire partie donne une identité, un sentiment d'appartenance, la solidarité et l'entraide y existent: là, ils peuvent gravir les échelons de la hiérarchie et devenir quelqu'un alors qu'à l'extérieur, ils ne sont personne dans une société où ce qu'on a compte bien plus que ce qu'on est. Bien sûr, il feront plus d'un séjour en prison, mais c'est un sujet de fierté, un rite de passage qui confère un certain prestige.

Les élèves les plus brillants et les plus tenaces auront accès à l'université, mais là aussi, le système est particulier, puisqu'on trouve des universités publiques et privées. Il existe un classement des meilleures (dont font partie Harvard et Yale) et les parents s'endettent souvent à vie pour que leurs enfants y étudient. Comptez quelque 22'000 dollars par an, logement et nourriture non inclus, ceci pendant 4-6 ans. Le salaire moyen étant de 35'000 dollars, le calcul est vite fait: seuls les familles aisées peuvent financer (à crédit) des études dans les meilleurs universités. Il y a cependant une astuce si vous êtes fauché, mais sportif de haut niveau: vous pourrez obtenir une bourse sport/études dans certaines universités. Et que se passe-t-il si vous êtes milliardaire mais que votre rejeton ne brille pas par son intelligence? Ne le répétez pas, mais un don de quelques millions de dollars à l'université (sous forme d'un fonds spécial ou d'une bourse qui portera votre nom) peut arranger bien des choses, d'autant que vos moyens permettent à votre petit de prendre tout son temps pour arriver au diplôme rêvé.

Et même si le gouvernement a fait des efforts (dont la discrimination positive, un train de mesures favorisant certains groupes qui ont subi des discriminations systématiques du fait de leur sexe ou de leur origine ethnique) pour donner de meilleures perspectives moins favorisés, le système capitaliste poussé à son paroxysme tel qu'il existe aux USA laisse bien des jeunes sur le bord du chemin.

Pour terminer sur une note plus optimiste, il faut aussi mentionner que les States restent un pays où tout est possible, avec beaucoup de travail et de détermination. Le "miracle américain" existe encore. J'en veux pour exemple le plombier qui est venu réparer notre chasse d'eau. Il a émigré aux USA il y a 19 ans et a commencé comme simple ouvrier dans une grosse entreprise sanitaire. Après quelques années, il s'est mis à son compte et a offert ses services à des agences immobilières pour contrôler et réparer la plomberie des maisons en vente. Puis un jour, on lui a demandé s'il savait poser du carrelage. Il ne l'avait jamais fait, mais il n'a pas hésité à dire "oui" et s'est lancé avec les conseils d'un copain. De fil en aiguille, il a appris à faire de tout, de la pose de la moquette à celle du papier peint, de la maçonnerie à l'électricité. Aujourd'hui, il ne parvient pas à répondre à la demande; il est fier de dire qu'il va skier chaque hiver en Autriche et qu'il conduit une voiture à 100'000 dollars totalement payée. Mais il avoue aussi que les métiers manuels sont mal considérés et que les agents immobiliers pour lesquels il travaille n'ont de respect pour lui qu'à partir du jour où ils l'ont vu au volant de sa belle voiture...

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