La crise financière a encore frappé

Ce matin, le téléphone sonne... C'est Barbara (notre propriétaire) qui nous prévient que l'on pourrait avoir la visite d'une personne apportant des documents et qu'il ne faut rien signer, mais juste prendre les documents éventuels et dire à la personne de s'adresser à eux (qui habitent en face). Pour être sûre d'identifier la bonne personne, je demande de quelle sorte de documents il s'agit. Et là, on tombe des nues... Barbara m'explique, la gorge serrée, que la situation économique les force à vendre la maison où nous logeons! Notre séjour n'est heureusement pas remis en question parce que la vente ne sera effective que dans plusieurs mois, mais c'est un choc.
Voilà un couple apparemment plus qu'aisé, propriétaire de plusieurs maisons, d'un yacht et de deux voitures, qui se trouve réduit à essayer de vendre d'urgence ses biens immobiliers avant leur saisie, au plus mauvais moment puisque le marché s'est effondré et que les maisons sont bradées. Les agences immobilières tentent d'ailleurs d'appâter les clients potentiels avec des rabais allant jusqu'à 20% sur le prix demandé il y a encore peu!
De fait, on constate une fois de plus que l'on ne paie jamais vraiment ce qu'on achète ici, on se contente de verser les intérêts sur les crédits qu'on a obtenus. Et quand ces intérêts se montent à plusieurs milliers de dollars par mois, absorbant la plus grande partie du revenu, il en faut peu pour que tout bascule. Aux intérêts que l'on ne parvient plus à payer dans les délais viennent s'ajouter de grosses pénalités de retard; si l'on n'est pas en mesure de redresser la situation, il faut vendre pour éviter la saisie. Si l'on imagine que Barbara et Barry ont pris un crédit de 450'000 dollars pour cette maison et qu'ils arrivent à la revendre pour 350'000, Il leur restera quand même une dette de 100'000 dollars dont ils paieront les intérêts toute leur vie alors qu'ils n'ont plus la maison...

La situation dans cette région de Floride est dramatique. Beaucoup de gens se retrouvent à la rue et il y a quelques jours, le journal comportait un long article sur des familles ayant dû quitter leur maison pour emménager dans des mobilhomes au camping... La ville de Cape Coral a mis sur pied un programme intitulé "Adopt a family for Christmas" (adoptez une famille pour Noël). On s'inscrit pour accueillir une famille pour Noël: on offre le repas et pour 50$ de cadeaux pour chaque enfant. Un autre article donnait des conseils sur la manière d'expliquer aux enfants qu'ils n'auront pas les cadeaux inscrits sur leur liste au Père Noël et suggérait des idées de cadeaux à fabriquer soi-même. Il faut dire que si chez nous on déplore que Noël soit une fête si commerciale, ici cela prend des proportions gigantesques! Deux chaînes de télévision sont consacrées 24 h sur 24 au télé-achat et bien sûr, en ce moment, tout est axé sur Noël, mais de manière assez perverse. La publicité joue sur le fait que les gens ont moins d'argent, mais veulent sauver les apparences. En gros, cela donne: "Votre femme rêve d'un bijou et vous n'avez pas les moyens? Achetez ce magnifique collier qui la ravira ...Ses finitions sont si parfaites que personne ne verra que c'est du toc et que vous ne l'avez payé que 29$!".

On retrouve cet état d'esprit dans les maisons. La nôtre a des murs extérieurs qui semblent avoir une épaisseur de quelque 20 cm, mais si l'on y regarde de près, le mur a tout au plus 8-10 cm d'épaisseur et le reste, c'est un rajout de placoplâtre qui sonne creux...Les meubles ont l'air d'être en bois massif, mais c'est du plastique; notre table a l'air d'être en rotin peint en couleur crème, mais c'est une résine synthétique...

C'est une société où seules comptent les apparences et la frime. Peu importe que la qualité soit médiocre, pourvu que "ça en jette".